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La Guerre de Sept Ans en Nouvelle-France

En Nouvelle-France, la Guerre dite de Sept Ans (1756-1763) dura dans les faits 9 années : c'est la Guerre de la Conquête (1754-1763).
En effet, sur le continent nord-américain, le conflit entre les Anglais et Français éclate 2 ans avant le début de la guerre mondiale qui provoqua la perte de la colonie française.

Tout commence en 1754.
Alors que la frontière entre les colonies anglaises et la Nouvelle-France est mal définie (notamment celle de l’Acadie cédée par le traité d'Utrecht, qui a mis fin à la guerre de succession d'Espagne), la vallée de l'Ohio est un sujet de litige.
Au printemps de cette année, le gouverneur de Virginie envoie George Washington à la tête d'une milice avec pour directives de franchir les monts Alleghany, de bâtir des forts et de déloger les français de la vallée.
A la même époque, les autorités coloniales Françaises demandent à leurs alliés des 7 Nations de se joindre à la force d'occupation de l'Ohio. Ces derniers acceptent, à condition de ne pas être obligés de prendre part à de quelconques opérations militaires. Ainsi, 130 Abénaquis, Hurons, Iroquois christianisés, Algonquins et Népissingues participent à ce voyage vers l'ouest. Ils sont accompagnés de quelques officiers français.
Ce groupe remonte le Saint-Laurent à partir de Montréal et traverse le lac Ontario, puis le lac Erié, afin de rejoindre la troupe française préalablement partie dans la vallée de l'Ohio, pour y construire le fort Duquesne.

C'est alors que dans la vallée tant convoitée, l'attaque d'une ambassade française, venue délivrer aux anglais une sommation de retrait des terres du roi Louis XV, est l'étincelle qui met le feu aux poudres : c'est l'affaire Jumonville.

Le 15 juin au matin, le groupe franco-amérindien reprend sa marche après avoir bivouaqué la veille ; il rencontre alors un officier français porteur d'une terrible nouvelle : alors que la France et l'Angleterre sont officiellement  en paix depuis 1713, des hostilités sont engagées entre les  deux forces coloniales, dans la vallée de l'Ohio, et le frère cadet d'un officier présent dans le groupe (Louis Coulon de Villier), a été tué.
Le groupe continue sa marche le long du portage du lac Chautauqua ; les amérindiens savent qu'ils sont désormais sur le sentier de la guerre...

Au matin du 26 juin, les alliés arrivent au fort Duquesne.
Le commandant du fort, Contrecoeur, a rassemblé un détachement de 500 français et 11 amérindiens, qui partira à la rencontre de l'ennemi le lendemain matin...
Les guerriers des 7 Nations et les français se réunissent alors en conseil. Les français demandent à leurs alliés d'accepter d'accompagner l'expédition du lendemain.

Fort Nécessity

Contrecoeur déclare être venu dans la vallée de l'Ohio, lui aussi, pour maintenir la paix ; mais les Virginiens ayant tué l'émissaire qu'il leur avait envoyé pour leur demander de rentrer chez eux, les français n'ont d'autre choix que de riposter.

Contrecoeur offre une ceinture wampum aux représentants de chaque Nation présente au conseil et leur demande d'accepter la hache de guerre. Les Amérindiens étant divisés, certains resteront au fort, alors que d'autres acceptent de combattre pour peu que l'assaut soit repoussé au surlendemain pour leur donner le temps de se préparer.

Le 28 juin, l'expédition (cinquantaine d'Amérindiens et 600 français) quitte le fort.
Les Amérindiens prennent vite le contrôle de l'expédition ; ils acceptent toutefois, à la demande de Villiers, de laisser 5 guerriers avec 20 miliciens pour veiller sur les canots et les vivres.
Le 1er juillet, la colonne apprend par un déserteur britannique que les Virginiens se sont retranchés dans un fort que les éclaireurs repèrent 2 jours après. Le fort, qui n'est pas fini, est un emplacement de 16 mètres de diamètre entouré d'une palissade protégeant une petite hutte d'écorce qui fait office de dépôt de vivres et munitions. Il est commandé par Georges Washington. Lorsque les alliés arrivent au fort Nécessity, dressé dans une clairière, ils essuient le feu de 9 canons ; de plus les Virginiens et miliciens de Caroline du Sud avancent vers eux en ligne de bataille. Aussitôt, les alliés se ruent vers le fort en poussant des cris de guerre. Effrayés, les coloniaux britanniques se précipitent derrière le retranchement. Les alliés vont alors s'embusquer derrière les arbres d'une hauteur qui est à portée de tir du fort ; cette position, plongeante sur l'ennemi, leur donne l'avantage. Ce siège, qui dure une après-midi, se solde par 3 hommes tués et 17 blessés chez les alliés, pour 30 morts et 70 blessés chez les britanniques. La capitulation est signée dans la soirée.
Malgré cette rédition, les amérindiens attaquent les britanniques le lendemain pour obtenir une victoire selon leurs propres critères : obtenir des prisonniers et du matériel ; 8 britanniques sont abattus et 7 dépouillés de leurs vêtements.
Blâmés par Villier qui considère cela comme une violation de la capitulation, les Amérindiens laissent partir les britanniques.

Ainsi les Virginiens ont-ils été repoussés au-delà des Appalaches, pour un temps...

La bataille de la Monongahela

Mais les Britanniques, revendiquant toujours la vallée de l'Ohio, ne pouvaient en rester là.
En juillet 1755, une expédition militaire avance à nouveau dans cette vallée avec pour objectif de prendre le fort Duquesne aux Français. Les Britanniques, commandés par le général E. Braddock, avancent prudemment pour éviter toute embuscade. Leur progression est lente et constante. Au début de juillet, les soldats des troupes régulières et provinciales de Braddock arrivent près du fort avec une puissante artillerie. Le 7 juillet, 4 éclaireurs Abénaquis aperçoivent l'armée de Braddock à 30 kms du fort et ouvrent le feu sur l'arrière-garde de la colonne.
Mais la colonne continue son avancée régulière et passe à gué la rivière Monongahela (la Mal Engueulée en Français) à 4 lieues (environ 16 kms) au dessus du fort.
Les Français et leurs alliés, conscients que leurs défenses seraient écrasées par une telle puissance  de feu, décident de faire une sortie pour affronter l'ennemi dans la forêt, avant qu'il n'atteigne le confluent de l'Ohio.
Les soldats et miliciens Français étant très peu nombreux, l'issu de l'opération dépendra entièrement du soutien de leurs alliés Amérindiens.
Le 9 juillet au matin, alors que le commandant Contrecoeur reste avec 100 hommes de garnison et autant d'autochtones pour la garde du fort, 1100 hommes (350 Français et 750 indiens) se mettent en marche. Ils sont sous les commandements des capitaines Baujeu, Dumas, le Mercier et autres. Cette armée qui marche à la rencontre de l'ennemi, sur 3 colonnes dans les bois, a toujours des éclaireurs en avant. A midi, l'alliance fait halte sur la nouvelle qu'une partie de l'armée ennemie a passé la rivière avec son artillerie, et qu'elle fait halte en attendant son arrière garde et ses caissons. La coalition n'est alors qu'à un quart de lieue (1 km) des "tuniques rouges". L'ordre est aussitôt donné de doubler le pas et d'attaquer immédiatement l'ennemi de front comme de côté.
"Les sauvages firent le cri de guerre et les français commencèrent par une décharge générale qui fut imitée des sauvages. L'ennemi surprit se rangea en bataille, fit jouer son artillerie dont le commandant Baujeu fut tué à la première décharge. Les sauvages épouvantés du bruit du canon auquel ils n'étaient pas accoutumés, prirent un moment la fuite ; mais le capitaine Dumas ayant prit le commandement aussitôt la perte du sieur Baujeu et ayant encouragé les Français, les sauvages voyant cette fermeté et n'entendant plus le canon dont les Français s'étaient emparé, revinrent charger l'ennemi à l'exemple des Français et le forcèrent après 2 heures de combat de battre en retraite laissant 2000 morts sur le champ de bataille. Ils repassèrent à la hâte la rivière ou ils perdirent encore du monde par la fusillade qui ne cessait de pleuvoir sur eux. L'ennemi dans sa déroute perdit son artillerie, ses caissons et 15 drapeaux ainsi que sa caisse militaire. Les canons au nombre de 9 furent encloués sur le champ de bataille au moment de leur prise.
                      

La bataille de la Monongahela (fin)

Le Général Bradock fut blessé dans cette affaire et emmené par les fuyards dans un carrosse qu'il avait à l'arrière garde, de l'autre côté de la rivière ; c'était bien là un objet de luxe qui n'était d'aucune utilité dans les bois et les montagnes où, pour la première fois on en voyait. Après cette défaite de l'ennemi qu'on ne jugea pas à propos de poursuivre, on pilla les caissons au nombre de seize, chargés de munitions, vivres et rhum dont quelques sauvages s'étant enivrés, obligea les Français de crever les barils pour éviter un désordre qui n'aurait pas manqué d'arriver sans cette sage précaution. Les sauvages tombèrent les premiers sur la caisse militaire et ne connaissant pas le prix de l'argent, ils l'éparpillèrent à droite et à gauche dans le bois. Les Français s'amusèrent à le ramasser et à fouiller les morts parmi lesquels se trouvèrent cinq cent officiers sur la dépouille desquels on s'attacha de préférence. On passa la nuit à garder le champ de bataille et dans un silence profond, et cela dans l'incertitude de l'apparition de l'ennemi. "Comme on était deux à deux assis au pied de chaque arbre, il se trouva auprès de celui ou j'étais, moi deuxième, un homme qui se mit à bailler et à parler sauvage en jurant contre les Anglais ; d'abord à son bâillement nous le crûmes un anglais blessé, mais à son parler nous ne doutâmes plus qu'il ne fût un sauvage" (un Chaouanon) "qui se fût endormi par ivresse ; cependant craignant, s'il nous entendait remuer qu'il ne nous soupçonna ennemi et que dans cette idée il ne se jeta sur nous à coup de casse-tête, nous résolûmes de rester sur la défensive." Le lendemain matin,"l'ennemi ne paraissant pas, nous reprîmes le chemin du fort Duquesne avec les dépouilles de l'ennemi. Les Français perdirent dans cette affaire onze hommes et environ vingt deux blessés, les sauvages en perdirent deux et environ cinq blessé ; ils firent seize prisonniers. On les empêche de lever la chevelure aux morts qu'on prit soin d'enterrer ; à la suite de cette affaire, trois cents des sauvages s'en retournèrent dans leurs villages emmenant avec eux les seize prisonniers. Le surplus des sauvages resta pour faire des courses sur les habitations anglaises."